Je vis donc un moment d’ataraxie totale. Quelques centaines de lecteurs sont déjà présents. Je publie ce qui me chante, en fonction de l’actualité et de l’inactualité, sur des sujets qui, à première vue, ne se recoupent pas forcément. Cela peut surprendre. Passer des Stones à Attali puis au botrytis, n’est-ce pas incongru ? demanderont les esprits étanches… Excellente question, merci d’y avoir répondu… Quelle est la suivante ? Vous l’aurez compris, Mille plateaux, quelque part, ne ressemble pas tout à fait à un blog… Ni journal intime, ni blog spécialisé, monomaniaque, il est une plate-forme d’échanges, une circulation d’idées, d’affects, d’intensités. Une forme de revue au jour le jour, sans contrainte économique ou éditoriale. C’est cela la formidable chance (le risque aussi) que nous offre le web et, franchement, je n’aurais pas souhaité, si la question m’avait été posée, vivre à une autre époque que celle-ci ! J’hésite entre le travail du journaliste et celui du chroniqueur intempestif, cher à Nietzsche. Dans ce laboratoire virtuel qu’est Mille plateaux, je savoure la liberté qui m’est offerte, je la partage avec vous, chers lecteurs, car qu’aurions-nous d’autre de plus urgent à faire ?
Pour me prémunir de toute dérive, de toute tendance au psittacisme – étrange la façon dont parfois les journalistes parlent tous du même sujet, au même moment, de la même façon ; citent toujours les mêmes références… – pour me guérir d’adhérer trop à l’ambiance de l’époque, je repense à cette analyse de Jacques Bouveresse dans Le philosophe et le réel, qui commence par citer une phrase de Musil :
Quant aux journalistes, quand on considère leurs engouements et leurs revirements successifs sur une période un peu longue, il est difficile de percevoir la plupart d’entre eux autrement que comme des suiveurs-nés qui aimeraient bien se faire passer pour des pionniers. »
Et pour finir sur des notes plus joyeuses, écoutez sans tarder Imitosis d'Andrew Bird, un songwriter épatant originaire de Chicago, beau comme un ange et demi, il joue du violon et chante à la perfection :
He's keeping busy
Yeah he's bleeding stones
With his machinations and his palindromes
It was anything but hear the voice
That says that we're all basically alone